Chronique d’une folle semaine !

Tout a commencé le vendredi 16. J’en étais à mon troisième jour de cycle. D’habitude, c’est le deuxième qui est le plus virulent mais il était passé et je m’en félicitais. J’ai été réveillée par la sonnerie de mon portable, puis j’ai posé mes collyres dans mes yeux comme tous les matins sans rien ressentir de particulier. Est arrivé le moment où j’ai dû me lever… Je m’assieds sur le bord de mon lit et là… Une DOULEUR comme on peut difficilement en imaginer ! On aurait dit qu’un objet tranchant se trouvait à l’intérieur de mon ventre ou que mes muscles se déchiraient ! Je n’arrivais même pas à supporter la position assise ! Franchement, je ne voyais pas comment j’aurais pu prendre le bus ou passer la journée assise devant mon bureau. Je me suis donc résolue à rester chez moi malgré le boulot et le Comité Hygiène et Sécurité prévu l’après-midi même.

Le soir venu, je me suis rendue chez le médecin avec la simple intention d’obtenir un certificat médical pour justifier mon absence. J’étais un peu gênée de lui expliquer que j’avais loupé une journée de boulot pour une simple dysménorrhée mais lui a pris les choses nettement plus sérieusement et, après m’avoir auscultée, il m’a prescrit toute une batterie d’examens : j’ai eu droit à une prise de sang lundi matin, puis dans la journée de mardi, le cabinet médical m’a appelée pour me dire que je devais pratiquer de nouvelles analyses sanguines mais sans m’expliquer pourquoi. Alors là, je dois avouer que je me suis posée de sacrées questions. Et j’ai fait ce qu’il ne faut absolument pas faire dans des situations pareilles : je me suis mise devant Internet et me suis lancée dans des recherches qui se sont malheureusement avérées fructueuses. Mon médecin m’ayant parlé de possibles problèmes au niveau de l’endomètre, j’ai fait une recherche sur “endomètre”, qui m’a tout naturellement conduite vers “cancer de l’endomètre” et là, j’ai découvert que cette maladie touchait plus principalement des femmes occidentales et blanches devenues nubiles avant l’âge de 12 ans, obèses ou en simple surpoids, infertiles ou n’ayant pas eu d’enfant, ayant connu des problèmes de vésicule biliaire et exerçant une activité sédentaire. En un mot, mon portrait ! Autant dire qu’après cette édifiante lecture, tout m’est passé par la tête ! Je me disais même que j’allais faire couper mes beaux cheveux que j’ai eu tant de mal à faire pousser car je ne voulais pas avoir le dépit de les voir tomber suite à une éventuelle chimiothérapie !!!!

Oui, je sais : je suis d’un naturel éminemment optimiste, parfois !

S’en sont suivies d’autres analyses médicales, d’autres prises de sang (une tous les deux jours, en fait !) et même un voyage professionnel express à Paris dont je me serais bien passée dans l’état de fatigue où je me trouvais ! Il est vrai que depuis quelque temps, je me traîne littéralement ! Je suis vraiment crevée. Je n’ai même pas eu le temps de m’arrêter chez Tinky lors de cet aller-retour dans la capitale ! J’étais attendue le lendemain à la première heure pour d’autres examens ! Mon médecin avait même réussi à négocier à l’arrache deux rendez-vous ce même jeudi : un pour une échographie et l’autre chez un gynécologue. On a pu les déplacer et c’est donc ce samedi matin que j’ai pu pratiquer l’échographie et voir le gynéco qui est aussi chirurgien et obstétricien.

Les résultats de l’échographie ne m’ont pas surprise outre mesure : une très grosse anémie avait été diagnostiquée suite à mes deux derniers cycles qui se sont avérés surabondants. J’ai toujours été enquiquinée comme pas permis avec ça mais depuis quelque temps, je battais des records en la matière, ce qui est aussi épuisant que désagréable. Tout cela était dû à la présence d’un fibrome dont je connaissais l’existence depuis un an mais dont la taille a considérablement augmenté depuis les derniers examens de routine. C’est lui qui cause ces douleurs intolérables et autres saignements abondants. Et quand j’ai vu le chirurgien, il était bien embêté car il s’avère que ce fibrome (qu’on peut aussi appeler “myome” : joli myome, c’est donc moi !) se trouve en partie dans la cavité utérine et en partie hors de cette cavité. Placé comme il l’est, il serait terriblement difficile, voire impossible, de l’enlever, même avec des moyens chirurgicaux. On ne peut toutefois pas le laisser en l’état car les saignements vont perdurer et mon anémie, déjà très prononcée, ne ferait qu’augmenter Je sècherais donc littéralement sur pieds si on ne faisait rien. Et l’on ne peut se contenter de traitement médicaux pour soigner cette anémie : j’ai un taux d’hémoglobine ridiculement bas et je manque de fer. Or, je ne peux envisager de prendre des médicaments à base de fer toute ma vie car cela finirait par me rendre malade ! N’est-ce pas une curieuse malice de la vie, tout de même ? Ma mère a une hémochromatose (une surcharge en fer dans le sang) et moi, je n’en ai pas assez ! Dans les deux cas, les incidences sur la santé peuvent être préoccupantes si on ne fait rien.

Et pour moi, on peut faire quelque chose ? Bien sûr ! Mais la solution est un peu radicale ! Puisqu’on ne peut enlever le myome ni par des moyens chirurgicaux, ni avec l’aide de médicaments, la solution ultime est… une hystérectomie ! En un mot, on va purement et simplement m’enlever l’utérus ! On me laissera mes ovaires, toutefois, afin que les cycles hormonaux puissent se poursuivre et que je ne perde pas totalement ma féminité mais pour le reste, l’opération est prévue le 4 janvier prochain. Nous en avons parlé longuement avec le chirurgien. Longuement et avec le plus grand calme. Je lui ai avoué que j’avais envisagé cette solution et même des chose bien plus épouvantables, encore !

Pour un peu, malgré ce que cette nouvelle peut avoir de terrible, je me sentirais presque soulagée !

C’est pourtant un coup dur ! Un coup de massue, même ! Dire que toute ma vie, je n’ai rêvé que de devenir Maman ! D’abord, je n’ai pas eu la chance de rencontrer (ou d’intéresser) un quelconque papa potentiel. Ensuite, il y a eu l’émergence de ce glaucome et la prescription d’un traitement hélas incompatible avec une grossesse et maintenant, cette tuile qui me tombe sur le coin de la figure.

Etrange existence que la mienne ! Pendant toute ma vie, les circonstances m’ont amenée à faire tout ce que je n’aurai voulu accomplir à aucune prix. Et d’un autre côté, mes voeux les plus chers ne se sont pour ainsi dire jamais exaucés. Et malgré cela, ma vie aura été heureuse.

Car malgré tout, je ne suis ni malheureuse, ni désespérée, à l’heure où j’écris ces lignes. J’ai presque envie de dire “au contraire”.

Déjà, j’ai imaginé des choses tellement épouvantables au sujet de ma santé que la vérité, apprise ce matin, me réconforte presque. Par ailleurs, le chirurgien m’a dit qu’il n’y avait que du positif à retirer de cette opération : arrêt des hémorragies, regain de vitalité… On m’annonce presque une renaissance !

Mais je le voyais bien que depuis quelque temps, j’étais fatiguée, je perdais mes cheveux par poignées, je prenais du poids plus que de raison et je souffrais d’un retour lymphatique calamiteux, qui m’a contrainte toute l’année à d’inutiles séances de kiné ainsi qu’au port d’orthèses aussi disgracieuses qu’inconfortables. Après cette opération, ce pourrait être enfin la fin de ces déagréments.

Alors, 2010 marquera-t-il le début d’une nouvelle vie pour moi ? Quand je pense que, pour rire, je disais à Maman “En 2008, il y a eu Alain avec son triple pontage ; en 2009, il y a eu Michel avec sa séparation et en 2010, ce sera à moi de te faire faire du souci !”. Je ferais bien de me méfier de mes intuitions car sur ce coup-là, je ne croyais pas si bien dire. Ma mère, la pauvre, est complètement catastrophée. Presque plus que moi ! C’est même moi qui lui remonte le moral !

Moi, je n’ai d’autre choix qu’accepter cette nouvelle fantaisie du destin. Maman dit que je “crane” un peu pour faire front. Je crois qu’en fait, la nouvelle m’a tellement choquée que j’ai produit suffisamment d’endorphines pour rester sereine pendant quelques jours. Et puis bon, on ne va pas pleurer ! Ca ne va rien arranger du tout !

Je suis un peu désolée pour la longueur de ce message. Navrée aussi d’avoir si longuement parlé de ma tuyauterie personnelle au sein de ce blog. Je ne pensais pas faire ça un jour mais si je ne peux pas raconter ici le déroulement d’épreuves qui changeront, à coup sûr tout le cours de ma vie, où puis-je le raconter ?

Ce n’est pas de l’impudeur non plus. Je crois que ce blog va devenir un peu plus sérieux qu’il ne l’était. Je vous tiendrai au courant de ma folle odyssée en espérant que mon témoignage pourra être utile à d’autres jeunes femmes dans ma situation… La suite au prochain numéro, donc !