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27 février 2011

L’adieu aux armes ou plutôt à l’arme absolue.

Voilà un bon petit bout de temps que je n’étais pas revenue sur ce blog ! Plus d’un mois ! Il faut dire que, conformément à ce que j’avais prévu, mon travail m’a sacrément mobilisée ! Je suis passée par des périodes de stress, de doute, de fébrilité et de déprime féroce tant et si bien que les seuls articles qui me venaient à l’esprit n’étaient rien d’autres que de longues lamentations sur mon misérable sort ! Tout bien réfléchi, j’ai pensé que ce ne serait ni agréable à écrire, ni intéressant à lire et je me suis donc abstenue. 

Et puis, le temps passant, j’ai fini par trouver un bon rythme de croisière et maintenant, je pense pouvoir dire que j’assure l’ensemble de mes tâches avec aisance et efficacité (on dirait une lettre de motivation !!!). Mais très sincèrement, ce que je fais me plaît et je me sens vraiment détendue et épanouie. 

L’arrivée timide du printemps doit y être pour quelque chose : on commence à voir affleurer dans l’herbe encore rase de timides pâquerettes et des violettes assez pâles et peu odorantes. Au froid des premières semaines de l’année succèdent des températures plus douces, des cieux tourmentés et des éclaircies qui annoncent les giboulées tandis que les merles chantent le soir avec un enthousiasme communicatif. 

L’opération de ma collègue Monique s’est bien passée. Nous lui avons rendu de fréquentes visites et avons vu sa main passer par diverses formes, diverses couleurs et diverses atèles. Maintenant, il ne lui reste plus que quelques séances de rééducation pour récupérer le plein usage de ses doigts. Elle reste néanmoins arrêtée jusqu’à la mi-mars. Mais avec les autres collègues, nous nous partageons son travail et nous nous en sortons, je pense, assez honorablement. 

Tout irait donc à peu près bien dans un monde pas si mal que ça si une nouvelle particulièrement préoccupante, voire très contrariante ne venait gâcher mon quotidien.

J’ai souvent évoqué, sur ce blog, le fait que je souffre de migraines chroniques, liées sans doute à mes problèmes de vue. D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu tendance à avoir de terribles maux de tête. Longtemps, il m’a suffi de m’allonger dans le noir sans bouger ni parler pour en venir à bout. Mais au fil du temps, avec l’adolescence – et peut-être les hormones ! – les migraines se sont faites de plus en plus fréquentes et virulentes ! Jusqu’à ce 1er avril 1990 où j’ai carrément cru que j’étais atteinte de méningite et que j’allais en mourir ! 

Je n’exagère pas ! Déjà, trois jours avant, j’avais eu une première crise absolument terrible. J’étais encore étudiante et passais mes semaines en cité universitaire. Je n’avais rien de particulier sous la main pour me soulager, sauf peut-être de l’Aspégic qui ne me fit pas grand effet. Je passai la nuit du jeudi au vendredi avec l’impression que ma tête se brisait à chaque seconde sur l’oreiller ! Des pulsations insupportables ! Le lendemain, alors que je ne suis pas quelqu’un qui aborde facilement les inconnus, je demandai à la première étudiante que je croisai si elle n’aurait pas un aspirine car je n’en pouvais plus. Comme je devais vraiment avoir une sale tête, elle me donna sans faire de difficulté quelque cachet qui me soulagea relativement. 

Mais le dimanche, les maux de tête reprirent avec plus de vigueur encore ! Rien de ce qu’on me donnait ne me soulageait, le moindre bruit, la moindre lumière était une véritable torture ! Et comme j’ai pour spécialité de tomber malade exclusivement pendant les vacances, les jours fériés et les dimanches, ma mère se résolut à m’emmener chez le médecin de garde. 

Ce dernier procéda à un examen approfondi, avouant lui-même craindre une méningite mais il n’en était rien et au final il se décida à me faire une injection avant de me prescrire un médicament dont je n’avais jamais entendu parler : le Propofan. 

 Le soulagement apporté par ce petit comprimé blanc fut à la hauteur de mes souffrances passées et depuis 21 ans, ce médicament est devenu mon sauveur, mon compagnon, mon salvateur, celui qui, parfois, m’a carrément donné la possibilité de me lever le matin pour me rendre au boulot, celui qui m’a si souvent permis de repartir du bon pied alors que les prémices d’une crise s’annonçaient ! Sans lui, j’aurais sans doute passé des journées entières réfugiée dans mon lit, le store baissé, la couette par-dessus la tête dans une maison impérativement silencieuse, à écouter les pulsations de mon propre sang dans ma tête douloureuse ! 

Et c’est peut-être ce qui risque d’arriver bien souvent, maintenant car, à mon grand désespoir l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a suivi les préconisations du Comité des médicaments à usage humain de l'EMEA (Agence européenne d'évaluation des médicaments) qui a purement et simplement décrété l’interdiction de ce médicament et même de ses génériques ! Idem pour le di-antalvic et tous les médicaments contenant l'association paracétamol / dextropropoxyphène (DXP) et caféïne (au moins dans le cas du Propofan). 

Pourquoi ? Parce qu’en Suède et en Angleterre, il y aurait eu des “accidents de surdosage” ! C’est proprement désespérant d’autant que dans un grand nombre de cas, ces surdosages sont volontaires car dus à des tentatives de suicide ! Et puis quand bien même ! Ce n’est pas parce que des idiots en Angleterre ou en Suède n’ont pas été fichus de respecter le dosage indiqué sur leurs ordonnances qu’il faut pénaliser tout le monde ! J’en ai marre de cette société qui infantilise les gens et qui, au lieu de les éduquer, fait bêtement disparaitre tout ce qui peut être jugé dangereux, à tort ou à raison ! Dans ce cas, jouons le jeu à fond : puisqu’il arrive que des gens s’électrocutent, interdisons l’électricité ! Puisque parfois, des gens ont des accidents de voiture, interdisons les voitures ! Et puis tant qu’on y est, puisque la plupart des gens meurent dans leur lit, considérons que le lit est un espace dangereux et supprimons les lits ! 

Non mais sérieusement, je suis vraiment énervée ! D’autant que, sur les articles traitant du sujet, on invite les patients habitués à prendre ce médicament à consulter leur médecin pour trouver un traitement alternatif, à voir un neurologue pour un traitement de fond voire à entamer une période de sevrage ! Non mais on se calme ! Je n’ai pas besoin d’un neurologue et encore moins d’un sevrage ! Je prends ce médicament de manière ponctuelle et jamais en doses abusives. Je sais qu’on peut en prendre au moins six par jour mais je suis loin du compte ! J’en ai pris quatre dans une journée il y a longtemps. C’est vraiment le grand maximum que j’aie pu atteindre et je n’ai jamais recommencé car cela m’avait donné un peu de nausée. Un seul, de temps en temps, suffit souvent à me soulager. Dans le pire des cas je peux monter à trois dans une journée mais il peut aussi m’arriver de passer des semaines entières sans en prendre un seul. Et à d’autres moments, il m’en faudra un par jour pendant une courte période. Ça dépend. Pour autant, je ne suis pas accro, je ne suis pas dépendante de ce médicament mais j’en ai quand même besoin ! Je ne sais pas du tout ce que je vais devenir, maintenant, même si je dois reconnaître que depuis mon ablation de la vésicule biliaire en 2001 puis de l’utérus en 2010, je suis un peu moins sujette à la migraine. Il n’empêche que quand elle est là elle est bien là ! Sournoise, omniprésente, tapie au fond de mon crâne ! SI on me donnait un pastel, je crois que je pourrais même la dessiner : elle a la forme de l’Afrique. Ou de l’Amérique du Sud, ça dépend de quel côté de ma tête elle s’installe. Et elle me prend la moitié du front, l’œil, le sinus, le maxillaire, la tempe, parfois la nuque et quelques dents… L’idée de devoir endurer tout ça sans pouvoir recourir au moindre palliatif me paraît franchement terrifiante ! 

Oh, bien sûr, il me reste quelques boîtes d’avance et j’ai même réussi à obtenir ce soir quelques boîtes de génériques. J’ai donc plusieurs mois de tranquillité assurés mais après, qu’adviendra-t-il de moi, de ma productivité, de mon efficacité, ça, je n’en sais rien ! Même chose pour Maman qui utilise ces médicaments pour son mal de dos quasi-permanent !

Le pire est que ma pharmacienne m’a dit que cette interdiction était dûe au fait que des gens avaient abusé de ce médicament mais en contrepartie, elle m’a dit que je pourrais trouver de nouveaux traitements à base… de codéine ! Non mais on croit rêver ! On me fait la morale parce que je prends du Propofan (le confondrait-on avec le sinistre Propofol qui a coûté la vie au malheureux Michael Jackson ?), on a même refusé que je procède a un don de sang alors que je suis donneuse depuis des années (le tout en s’adressant à moi d’un ton paternaliste comme si j’étais une junky irrécupérable !) et on me propose quoi à la place ? Un dérivé de la morphine ? Trêve de plaisanterie !

Quand Maman avait été hospitalisée en 2009 pour une suspicion d’embolie pulmonaire qui n’était finalement pas justifiée, j’avais vu arriver aux urgences une fille qui s’était involontairement shootée à la codéine et elle n’avait vraiment pas l’air dans son assiette, la pauvre ! Et c’est ce genre de poison que l’on me propose à la place de mon bon vieux médoc ! Non mais où va-t-on ? On marche sur la tête, oui ! C’est pour ça qu’on y a mal !

Enfin bon ! Si j’en suis réduite à prendre des dérivés morphiniques pour soulager mes migraines, je pourrai peut-être faire des rêves sympathiques et colorés en écoutant “Child in Time” en boucle comme cela m’était arrivé pendant ma dernière hospitalisation ainsi que je le raconte ici ! Maintenant, je ne sais pas trop ce que je donnerai au boulot et dans la vie courante !

Je ris mais je ris jaune !